Les communes n’arrivent plus à loger les réfugiés

Le Quotidien 30 octobre 2023

Le ministre Jean Asselborn demande aux communes de faire un effort pour loger les réfugiés, mais elles sont bien en peine de pouvoir lui donner satisfaction. La crise, c’est pour tout le monde.

L’appel de Jean Asselborn lancé aux communes pour héberger des bénéficiaires de protection internationale a fait l’objet d’une discussion au sein du Syvicol (Syndicat des villes et communes) la semaine dernière. En indiquant qu’un tiers seulement des communes du pays accueillaient des structures sur leur territoire, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration a déclenché des réactions «assez claires», selon le président Émile Eicher. La première étant que le problème de logement était d’ordre national.

«Nous sommes bien conscients qu’il y a un gros problème de logement, mais les communes disposent de peu de places libres puisqu’elles sont occupées tout de suite. Il faut savoir que les bénéficiaires de protection internationale qui sortent des structures sont en concurrence directe avec la population locale», ajoute-t-il.

Tous les offices sociaux sont débordés avec des listes d’attente qui n’en finissent plus. Les communes rappellent que l’État dispose aussi de logements inoccupés et de terrains qui pourraient accueillir des structures d’accueil. «J’ai déclaré lors de la réunion qu’il fallait être plus créatifs, par exemple, on peut rapidement changer un PAG (NDLR : plan d’aménagement général) pour installer des tiny houses ou encore monter des structures de type conteneur sur des terrains privés à louer», explique Émile Eicher.

Une chose est sûre pour les communes qui étaient réunies vendredi au Syvicol, le prochain gouvernement doit agir rapidement. «Nous devons voir avec les futurs ministres ce que l’on peut faire, tout en sachant que les communes rappellent à l’État qu’il peut lui aussi rénover des logements en sa possession», déclare encore le président.

Le Syvicol attend avec impatience les registres communaux et le registre national des bâtiments et des logements, puisque la loi prévoit que chaque commune dispose de son propre registre qu’elle devra alimenter et tenir à jour. Cela prendra encore du temps avant que ce recensement soit finalisé, alors qu’il y a urgence à trouver des solutions. Ces registres permettront d’introduire l’impôt à la mobilisation des terrains (IMOB) ainsi que l’impôt national sur la non-occupation de logements (INOL). Pas avant quelques années, alors que le problème général de logements abordables est une urgence absolue.

«Quand ces registres seront prêts, encore faudra-t-il mettre les logements disponibles en conformité. Il faudrait lancer une campagne, surtout à l’heure où le secteur de la construction tourne au ralenti», suggère Émile Eicher. «Avec des structures préfabriquées, on pourrait vite réagir. On les construit très rapidement, et c’est de bonne qualité. En tout cas, cela fait gagner du temps», dit-il encore.

Davantage de mixité

Les communes voient la réalité en face et savent que l’afflux de réfugiés va encore s’intensifier. «Tous les pays européens sont débordés et ont le même problème que nous. Ils freinent tous leur accueil car ils ne savent plus où loger les réfugiés.»

Les communes cherchent des solutions de leur côté et envisagent de loger les réfugiés dans des logements qui ne leur soient pas exclusivement réservés, afin d’avoir une mixité sociale et d’éviter les ghettos. «C’est plutôt une bonne idée», juge le président du Syvicol.

Il se tourne ensuite vers l’Union européenne en pointant un doigt accusateur. «L’UE n’est pas très efficace pour trouver les passeurs, on les laisse faire», regrette-t-il.

Selon l’Office national de l’accueil (ONA), parmi les bénéficiaires de protection internationale (BPI) logés dans ses structures, 1 595 personnes sont en ménage. La plupart des ménages sont généralement composés d’au moins deux à trois personnes (la moyenne est de 4,8 personnes/ménage). En effet, sur un total de 534 ménages BPI, 96 comprennent deux personnes (18 %) et 196 sont composés de trois ou quatre personnes (36,7 %). L’on retrouve également cinq ménages composés chacun de dix personnes et un ménage avec quinze membres. «La taille du ménage ne facilite pas la recherche d’un logement approprié sur un marché immobilier en crise», admet l’ONA.

Depuis lundi dernier et la décision de ne plus accueillir dans ses structures des hommes voyageant seuls, 19 personnes se trouvaient sur la liste d’attente au 26 octobre