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Qui sont les sans-papiers du Luxembourg?

Assistante sociale à l’Association de soutien aux travailleurs immigrés (ASTI), c’est elle qui a recueilli la parole de la jeune femme en situation irrégulière, victime de violences et exploitée par son patron (lire ci-contre) dont toute la presse a parlé cette semaine. Jessica Lopes l’a accompagnée pour déposer plainte, ce qui a valu à sa protégée une confiscation de son passeport et l’ordre de quitter le territoire dans les 30 jours. Une injustice à l’origine d’une vague d’indignation.

De quoi troubler la jeune assistante sociale engagée de longue date auprès des plus vulnérables : elle a, en effet, du mal à comprendre que cette histoire fasse l’objet de tant d’émoi alors qu’elle voit ça tous les jours. Dans un long entretien, elle lève le voile sur la réalité du terrain, loin des salons feutrés des ministères, sur les drames humains qui se jouent et sur les obstacles avec lesquels elle est forcée de composer.

Beaucoup d’idées fausses circulent à propos des sans-papiers. Qui sont-ils vraiment?

Jessica Lopes : Pour commencer, une personne sans papiers n’est pas une personne qui n’a pas de papiers! Pour pouvoir vivre au Luxembourg en tant qu’étranger, il faut des papiers d’identité et des papiers de séjour. Les ressortissants de pays tiers doivent les demander à la direction de l’Immigration, tandis que les citoyens européens doivent s’enregistrer auprès de la commune : quand on parle de sans-papiers, on désigne des personnes qui ne détiennent pas de titre de séjour valide. Rien à voir avec des gens sans identité dont on ignorerait les origines et le parcours.

En ce qui concerne les raisons pour lesquelles ils se retrouvent sans papiers : le plus souvent, ils sont entrés légalement sur le territoire, avec un visa touristique ou un titre de séjour temporaire (étudiant, jeune au pair, raisons privées, membre d’une famille), mais leur situation a changé et ne correspond plus aux conditions pour un renouvellement de leur titre de séjour. Typiquement : une personne avec un titre de séjour de travailleur salarié qui perd son emploi ou une personne dont le titre de séjour est lié à un mariage qui divorce.

Au moment où ils perdent leur droit de séjour, quitter le Luxembourg n’est pas une option. Il y a aussi les demandeurs d’asile, qui parfois sont en procédure pendant trois, quatre ans, et qui soudain écopent d’un refus définitif : ces familles décident souvent de rester, malgré la clandestinité. Un sans-papiers, c’est une personne qui, au moment où on parle, ne détient pas de titre de séjour valide. Cela ne veut pas dire qu’elle n’a jamais été en règle.

Logement, aides sociales, revenu minimum : là aussi, bon nombre de fantasmes existent. À quoi les personnes en situation irrégulière ont-elles droit au Luxembourg?

À rien du tout. De par leur statut, ce sont des personnes qui n’existent pas, elles sont comme des fantômes. Ces gens, ces familles, vivent ici depuis des années, mais n’ont absolument aucun droit. Ils sont exclus de toute aide sociale comme des foyers d’hébergement d’urgence ou des épiceries sociales.

C’est d’ailleurs pourquoi l’ASTI s’est mobilisée dès le début de la crise l’an dernier, car ils ont tous perdu leur travail dans les secteurs de l’Horeca et du bâtiment et, bien sûr, ils n’ont pu bénéficier d’aucun soutien. On a donc financé, sur dons privés, des bons alimentaires leur permettant de fréquenter les épiceries sociales. Plus de 100 000 euros ont été distribués à 500 bénéficiaires réguliers, dont 150 enfants. La plupart sont des familles originaires des pays de l’ex-Yougoslavie, du Brésil, du Pérou, du Sénégal, du Togo et du Cap-Vert.

Sans accès aux foyers, la seule solution, c’est les marchands de sommeil?

Exactement. On voit deux cas de figure : les hommes seuls errent dans les rues. La Wanteraktioun, qui vient de se terminer, étant l’unique refuge qui accepte les personnes en situation de séjour irrégulier, ils sont désormais sans toit et se retrouvent dans des squats ou s’adressent à des marchands de sommeil. Et puis, il y a les familles qui sont hébergées par d’autres personnes de la communauté, ce qui crée énormément de dépendance et donc de risque d’abus. Je pense à une femme avec enfants hébergée chez un monsieur qui est bienveillant pour l’instant, mais ça peut changer, et elle n’aura pas d’autre choix que de rester.

Est-ce qu’on sait combien ils sont?

Au Luxembourg, comme dans les autres pays, c’est quasiment impossible à chiffrer, puisqu’ils se cachent. Mais avec la pandémie, de nouveaux bénéficiaires se sont adressés à nous, pour arriver à ce nombre de 500 personnes rien qu’à l’ASTI. Maintenant, on est en train d’établir des listes pour ceux qui souhaitent se faire vacciner – puisque les sans-papiers ont été exclus des tests à grande échelle et de la campagne de vaccination –, et là encore, on voit apparaître de nouvelles personnes.

Leur situation les expose à toutes sortes d’abus. Que voyez-vous sur le terrain?

Ils subissent toutes formes de violence, à commencer par l’exploitation au travail. Typiquement, les femmes sont engagées pour s’occuper de personnes âgées ou malades, ou pour assurer les tâches ménagères dans des familles luxembourgeoises, à une rémunération bien inférieure par rapport à quelqu’un sous contrat.

Cette semaine, j’ai reçu une femme du Pérou qui est ici depuis 2016 et qui souhaitait s’affilier elle-même à la CNS pour 123 euros mensuels. Un compte bancaire est nécessaire bien sûr, mais sans papiers, impossible d’en ouvrir un. Elle a trouvé une femme luxembourgeoise qui a accepté de « l’aider » : elle lui a proposé de payer pour elle cette cotisation en échange de huit heures hebdomadaires de ménage dans sa maison de trois étages. Vous voyez, c’est ce genre de situations dans lesquelles les personnes sans papiers vont se retrouver, parfois sans même comprendre qu’elles sont exploitées.

Les responsables politiques ne sont pas à la hauteur?

Je ressens un manque de volonté de leur part de savoir ce qu’il se passe vraiment sur le terrain. Le ministre Jean Asselborn, qui fait souvent preuve d’humanité, est peut-être trop éloigné du terrain pour avoir conscience de ces situations. On a demandé un entretien avec lui pour lui faire part de ce qu’on voit tous les jours.

On est dans une logique qui consiste à suivre les règles établies, les lois : mais ces personnes sont là, alors qu’est-ce qu’on fait? Comment les aider si elles ne peuvent pas en parler? On doit sortir de cette bulle luxembourgeoise où on veut croire que tout va bien.

Les régulariser serait un vrai signe de solidarité de la part du Luxembourg qui se dit un pays d’accueil. Je pense que c’est le moment, avec cette pandémie, de remettre les compteurs à zéro et d’arrêter de faire l’autruche.

Vous plaidez pour une régularisation massive?

Ce serait un premier pas. Cela a été fait en 2013, où une grande partie des sans-papiers a été régularisée et cela n’a pas engendré d' »appel d’air » pour autant. Un autre pas serait d’analyser, dans nos lois, ce qui génère des situations irrégulières : encore hier, on a reçu un monsieur qui travaille dans une grande entreprise, avec un contrat de 30 heures. Il n’a pas pu renouveler son titre de séjour car il fallait un CDI de 40 heures, et du coup, privé de papiers, son employeur n’a pas pu le garder. Et il va lui être impossible de se faire embaucher ailleurs.

Cette condition qui, au départ, est censée le protéger et lui permettre de subvenir à ses besoins, crée des situations intenables dans les faits. Le Luxembourg doit être ouvert à la régularisation. La refuser n’empêche pas ces personnes d’être là et les maintient dans des conditions de vie qui ne sont pas dignes.

La jeune femme menacée d’expulsion toujours dans l’impasse

Convoquée ce jeudi à la direction de l’Immigration, la Brésilienne en situation irrégulière qui a dénoncé les violences de son patron est toujours dans une position incertaine : «Elle a pu récupérer son passeport et va maintenant introduire une demande de sursis à l’éloignement. Les autorités l’ont déjà informée qu’il sera accordé pour une durée de six mois», rapporte Jessica Lopes. «Elle est donc dans une sorte d’impasse, puisqu’elle n’est pas régularisée.»

Elle souhaite désormais que sa plainte aboutisse et être reconnue en tant que victime. «C’est le plus important pour elle», confie celle qui l’a accompagnée au commissariat. «Elle attend aussi d’être rémunérée pour tout le travail presté et jamais payé. Pour l’avenir, elle espère pouvoir rester au Luxembourg alors que son pays s’enfonce dans la crise sanitaire et économique.» Une demande de titre de séjour pour raisons privées a été déposée, avec une personne qui a signé pour elle un engagement de prise en charge, mais c’est «un titre difficile à obtenir», prévient l’assistante sociale.

Médecins du Monde s’inquiète

  • L’association appelle le gouvernement à tenir ses engagements internationaux en matière de santé pour tous.

En 2020, les équipes de Médecins du monde Luxembourg sont venues en aide à 771 personnes sur le territoire : des hommes pour la plupart, âgés de 36 à 54 ans, sans domicile personnel, isolés socialement, et vivant en dessous du seuil de pauvreté (moins de 2 013 euros par mois).

«Ce sont des personnes pauvres, mal logées et seules», résume la directrice générale, Sylvie Martin. «Elles n’ont pas d’adresse, donc pas d’aide sociale et pas d’accès aux soins, alors que ces conditions de vie indignes impactent énormément leur santé», déplore-t-elle. Ces quatre dernières années, près de 2 800 patients se sont ainsi succédé auprès des 115 bénévoles de l’association, qui estime que ce chiffre est encore loin de refléter l’ampleur du phénomène des personnes sans affiliation à la CNS.

Ces patients pas comme les autres «attendent que la douleur ne soit plus supportable pour venir nous voir», poursuit la jeune femme. «On essaye de couvrir tous les besoins, grâce à un réseau de médecins et de spécialistes qui acceptent de soigner gratuitement ces patients à leur cabinet privé» – certains, en situation irrégulière, ne souhaitant pas avoir à donner leur identité.

Mais ce n’est pas le cas de tous : en effet, en 2020, 9 % des bénéficiaires de Médecins du monde au Luxembourg étaient de nationalité luxembourgeoise. «C’est la troisième nationalité la plus représentée parmi nos patients, juste après les personnes roumaines et marocaines, et encore, ça se joue à cinq individus près», détaille Sylvie Martin.

Malgré les efforts de Médecins du monde pour adapter son offre face au covid dans ses centres d’accueil de Luxembourg et Esch-sur-Alzette, au foyer Esperanza de Bonnevoie et lors de la Wanteraktioun au Findel – soit près de 2 400 consultations l’an dernier, trop de personnes restent encore exclues des campagnes nationales, constate l’association.

D’où cette alerte : «Ce qu’on peut faire, juste en s’appuyant sur des dons, a des limites», explique la directrice, se rappelant cette jeune maman de 33 ans, enceinte de jumeaux et privée de suivi de grossesse parce qu’elle n’avait pas de papiers. «Ces personnes n’apparaissent dans aucune des statistiques nationales», se désole Sylvie Martin.

Une situation «inacceptable»

Cette situation, le vice-président Dr Bernard Thill, ne peut plus la supporter : «C’est inacceptable de laisser ces gens sans soins, à l’encontre des préconisations de l’OMS et des textes internationaux en faveur d’une couverture sanitaire universelle, auxquels le Luxembourg a pourtant souscrit», s’emporte le médecin engagé.

Médecins du monde Luxembourg plaide pour la création d’une «Gesondheetshëllef» financée par l’État via le Fonds national de solidarité : les ayants droit seraient enregistrés à la CNS et bénéficieraient d’un remboursement de leurs soins, sans que les finances de l’assurance maladie soient impactées. En parallèle, après avoir activement participé, début juin, à une première campagne de vaccination contre le covid dans le cadre de la Wanteraktioun, l’association demande la continuité de l’offre vaccinale pour les plus démunis : «On a une quarantaine de personnes volontaires qui attendent d’être vaccinées», annonce Sylvie Martin. «Nous avons présenté un projet au ministère de la Santé, on attend un retour. Les autres pays européens le font, pourquoi pas nous?», interroge-t-elle.

Médecins du monde souligne encore l’importance de protéger l’ensemble des personnes vivant sur le sol luxembourgeois et prie les autorités de faire confiance aux acteurs de terrain pour permettre la vaccination des individus sans matricule ou document d’identité.

Les plus démunis face au covid

Pour les personnes sans logement, la désorganisation de l’offre sociale durant les premières semaines de la crise sanitaire a eu des conséquences directes : «Certains n’ont même pas pu s’acheter du pain puisque les paiements en espèces étaient refusés dans certaines boulangeries», raconte Sylvie Martin, directrice générale de Médecins du monde Luxembourg. «D’autres ont dû trouver des solutions d’urgence pour des besoins aussi primaires que se nourrir, prendre une douche ou aller aux toilettes.»

Au niveau économique, l’impact a été immédiat pour ces exclus de l’aide sociale – car sans adresse : «Beaucoup ont perdu leur travail non déclaré dans la restauration ou la construction, sans oublier le manque, vu les rues désertes, des quelques revenus tirés de la mendicité.» Entre mars et juillet 2020, le nombre de nouveaux patients ayant franchi les portes d’un centre de soins a doublé par rapport à 2019 avec 125 dossiers créés : des hommes originaires d’un pays européen et qui n’ont pas pu rentrer chez eux, pour la plupart.

Mapping key migrant-led organisations across the EU

Migrant participation has been increasingly hailed as a prerequisite to meaningful policymaking and implementation in the field of integration. Notably, the new Action Plan on Integration and Inclusion, published by the European Commission (EC) to promote integration across the EU in the 2021-2027 period, specifically urges to step-up the participation of migrants in all stages of the integration process. With this scope, the Commission launched at the end of 2020 an Expert Group on the view of migrants to directly hear from third-country nationals (TCNs) in the conception and implementation of asylum, migration and integration policies.

With close to 34 million EU residents born outside the EU (Eurostat, Population data 2019) and large historic diasporas across the EU countries, ensuring migrant participation and representation should be an easy task. Yet, little is actually known about how migrants are able to associate across the different EU countries. What types of structures do they organise through in the different EU regions? Are migrants even able to form their own associations? What activities do they engage in on a national and local level, and are there any successes that can be traced back to them?

With this analysis, EWSI provides a glimpse into some of the most active – and, where possible, policy-relevant – migrant-led structures in the 27 EU countries (EU-27). The analysis is exploratory in nature, as the list of migrant-led structures is not exhaustive but focused on prominent examples identified by our network through desk research.

The report here

„Wenn wir auf der Straße sitzen,
 nehmen sie uns die Kinder weg“

PETINGEN Irakische Familie muss ihr Haus nach Gerichtsbeschluss verlassen und findet keine Bleibe

Vor acht Jahren kam Familie Alshimmry mit zwei kleinen Töchtern aus dem Irak nach Luxemburg. In ihrem Heimatland wurden sie politisch verfolgt und waren dem Tod nur knapp entronnen. Seit 2015 leben sie in einem Einfamilienhaus in Petingen, das sie nun nach einem Gerichtsbeschluss verlassen müssen. Inzwischen haben die Eltern vier Kinder und befürchten nun, diese in Erziehungseinrichtungen abgeben zu müssen, wenn sie demnächst keine neue Bleibe finden. Der aktuelle Wohnungsmarkt verschärft die Situation. Doch die Kinderrechte könnten der Familie eventuell in die Hände spielen.

Eric Rings,    tageblatt 10 April 2021

Kärjeng : nouveau foyer pour dpi

Jean Asselborn s’est rendu au Käerjenger Treff de Bascharage, lundi soir. Le ministre des Affaires étrangères et européennes, de l’Asile et de l’Immigration a participé à une réunion d’information des résidents en ce qui concerne l’ouverture d’un foyer d’accueil pour demandeurs de protection internationale (DPI). Il a salué «l’intérêt et la solidarité dont les citoyens ont fait preuve lors de cet échange de vues très encourageant». La future structure d’hébergement pour DPI de Bascharage aura une capacité de 66 lits et ouvrira ses portes au cours du mois d’avril 2021. Elle sera gérée par la Croix-Rouge luxembourgeoise et accueillera uniquement des familles. Il s’agit d’une structure dite «temporaire», dans laquelle les DPI séjournent jusqu’à réception d’une réponse à la demande de protection internationale.Cette nouvelle structure d’hébergement pour les DPI sera la 56e structure sous la responsabilité de l’Office national de l’accueil(ONA). Depuis la crise migratoire en 2015, le Grand-Duché a connu un flux relativement constant de nouvelles arrivées de demandeurs de protection internationale. «C’est grâce aux efforts de solidarité des acteurs communaux qu’un accueil digne des nouveaux arrivants a pu être assuré», souligne le ministère des Affairesét rangères et européennes, de l’Asile et de l’Immigration dans un communiqué,publié dans lasoirée de lundi.Jean Asselborn arappeléque«le défireste grand». En effet, les capacités des structures d’hébergement restent très limitées, notamment au vu de la difficulté des bénéficiaires de protection internationale (BPI) de quitter les structures. Dans ce contexte, le ministre des Affaires étrangères et européennes, de l’Asile et de l’Immigration, a réitéré son appel aux communes «de participer à l’effort de solidarité et demettre à disposition des emplacements pour la construction ou l’aménagement de structures d’hébergement pour demandeurs de protection internationale. Plusieurs aides financières et administratives sont disponibles aux communes accueillant des DPI ou BPIsur leur territoire».

Le Quotidien  31 mars 2021

Reportage sur RTL télé  29 März 2021 Flüchtlingsheem zu Käerjeng

Forum: Les tiers-lieux au Luxembourg: faire ensemble pour mieux vivre ensemble

Voici les 2 vidéos  sur le thème « Les tiers-lieux au Luxembourg : faire ensemble pour mieux vivre ensemble ». Le but était de discuter de la nécessité d’enrichir la vie en communauté par le biais de ce qu’on appelle les « tiers-lieux ».

Notre avenir se base sur une responsabilité partagée, nous avons donc besoin de lieux inspirants pour envisager des solutions aux défis sociétaux qui se posent. Imaginez des citoyens en contact par des réseaux sociaux ‘live’ ! La force d’un tiers-lieu -aussi attrayant que possible – est de devenir l’âme visible, le phare de l’engagement durable au niveau local.

Le Centre for Ecological Learning Luxembourg et l’ASTI, avec la participation du CNE -Conseil National pour Étrangers- ont invité à ce  forum virtuel

part 1

part 2

38 e Festival ….. online

Le 38e Festival des Migrations des Cultures et de la Citoyenneté, pandémie oblige passe online

De nombreuses conférences aborderont les sujets suivants:

  • le logement
  • l’intégration et les discriminations
  • les répercussions psychologiques de la crise sanitaire,
  • la réforme de la législations sur les asbl

Le programme complet et l’inscription pour les conférences sur le site du CLAE 

Les conférences seront retransmises sur le canal Youtube du CLAE.

Idem pour les discours officiels

Le volet musical se passera sur es ondes de Radio Latina

Bien manger, même quand on n’a rien

Lundi 14 h 30, à l’angle de la rue Michel-Welter à Luxembourg. Plusieurs personnes attendent patiemment, masque sur le nez et sacs de course au pied, devant l’épicerie sociale de Caritas. Celle-ci a ouvert ses portes il y a une demi-heure à peine, mais les bénéficiaires se succèdent déjà dans un ballet incessant pour accéder au plus grand choix de produits. Premier arrivé, premier servi.
Ici, on retrouve quelque 300 produits de base, vendus trois fois moins cher en moyenne que dans les grandes surfaces. Sur les étagères en bois qui courent le long du mur une fois le seuil de l’épicerie franchi, on retrouve les denrées non périssables et les conserves, telles que les paquets de pâtes, le sucre ou l’huile. C’est le stock le plus important de l’épicerie, les étagères dont il faut s’assurer qu’elles ne sont jamais vides, afin d’« être sûr que les bénéficiaires ne manquent pas d’aliments de base, car on ne peut pas être approvisionné dès que les rayons se vident comme dans les grands magasins », explique Irène Jamsek, la coordinatrice des Caritas Buttek. Et puis, des rayons pleins donnent moins le sentiment d’être dans une épicerie sociale. « C’est une forme de respect vis-à-vis des bénéficiaires. Tout comme le fait de ne pas leur fournir des tomates abîmées ou des carottes flétries. »
Fruits et légumes frais trônent d’ailleurs au centre de la petite échoppe, déjà disposés dans des sacs en papier, crise sanitaire oblige. Aubergines à 1,17 euro le kilo, 0,42 centime le kilo de bananes… Bien manger à un prix accessible reste le credo des épiceries sociales.
Sur d’autres rayons, il y a des invendus de la veille de la boulangerie Fischer, un peu de pain, quelques viennoiseries. De temps en temps, on peut y trouver des produits un peu plus «exceptionnels» pour l’épicerie. Aujourd’hui, ce sont des paquets de chips et de petits gâteaux. Au fond du magasin, les produits d’hygiène et d’entretien de la maison. Dans les frigos, les produits frais bien sûr, mais surtout des aliments à date de consommation courte comme des viandes, des poissons, quelques plats traiteurs. Ces articles sont vendus entre 20 centimes et un euro. Une aubaine pour des personnes qui n’ont pas accès à ces produits plus luxueux mais aussi une manière de lutter contre le gaspillage alimentaire. Les amateurs pourront ainsi prendre des noix de SaintJacques à consommer ce jour. Elles seront vendues un euro au lieu des 8,85 euros affichés sur la barquette.


Défi relevé pour Irène Jamsek, coordinatrice des épiceries sociales Caritas, et ses équipes : les Caritas Buttek ont su rester ouvertes depuis le début de la crise sanitaire.

Juste à côté des frigos, des étagères mettent en avant les produits entièrement gratuits du moment : du lait, quelques gels douche, du papier-toilette. Et aussi des masques, si indispensables en ces temps de pandémie. « Une fois par mois, nous proposons des articles gratuits financés par le Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD). Ils peuvent être pris en plus des 25 euros hebdomadaires alloués aux bénéficiaires. »

Vingt-cinq euros par semaine
Une assistante sociale analyse la situationfinancièredeséventuelsbénéficiaires. « Elle va regarder le montant qui rentre et tout l’argent qui sort. Si au final une personne seule dispose de moins de 400 euros, celle-ci pourra avoir accès à l’épicerie sociale », explique Irène Jamsek. Elle se verra alors accorder une carte d’accès d’une validité de trois mois maximum, renouvelable si nécessaire.
Le montant alloué est le même pour tout le monde: 25 euros par personne et par semaine. Cela peut paraître peu, mais en fait, « ces 25 euros équivalent à 75 euros dans une grande surface du fait du prix moins cher des produits », indique Irène Jamsek. Une réduction rendue possible grâce au travail de la «Spëndchen», la centrale d’achat des épiceries sociales de Caritas (ainsi que celles de la Croix-Rouge), qui a la charge de négocier les prix au plus bas avec les fournisseurs.
Au passage en caisse, deux possibilités pour les bénéficiaires : soit ils payent en espèces, soit, pour ceux qui n’ont absolument plus de moyens, le montant est enregistré et sera refacturé aux services sociaux, toujours à hauteur de 25 euros hebdomadaires. « On encourage les personnes à venir chaque semaine , précise Irène Jamsek. Si une famille de cinq personnes décide de venir une fois avec l’équivalent de trois semaines de bons, nous n’aurons plus de marchandise pour les autres! »
Voilà plus de dix ans maintenant que les Caritas Buttek viennent en aide aux plus défavorisés. Elles sont quatre dans le pays, Luxembourg donc, mais aussi Esch, Diekirch et Redange. À l’image de la capitale, le multiculturalisme est très visible ici. Ce qui a poussé Caritas à adapter un peu les produits. « On ne peut pas faire du cas par cas bien sûr, mais on essaie d’avoir plus de poulet et de fruits et légumes par exemple. »
Seul fait établi dans ce public très diversifié qui se rend à l’épicerie sociale : en général, les personnes âgées sont bénéficiaires sur le long terme, ce qui est moins le cas pour les plus jeunes, comme l’explique Irène Jamsek: « On peut supposer que la situation d’un individu plus jeune pourra évoluer, soit parce qu’il trouve du travail ou un travail mieux rémunéré, soit parce qu’il trouve un conjoint
Derrière l’image d’un pays riche, il y a donc beaucoup de gens qui peinent à s’en sortir. « Ce n’est pas évident pour les familles monoparentales par exemple. Beaucoup de nos bénéficiaires travaillent, mais n’arrivent pas à joindre les deux bouts, notamment à cause des loyers. » C’est le cas de Nilzete, une Brésilienne qui vit depuis treize ans au Luxembourg. Cette maman solo de 39 ans travaille, mais ne gagne pas assez pour couvrir ses besoins et ceux de sa fille de trois ans. « Le loyer est cher! Venir ici me soulage énormément, surtout pour les couches. »
Rachel, elle, a 52 ans. La vie n’a pas épargné cette Luxembourgeoise mère de trois enfants aujourd’hui adultes, divorcée de son conjoint. « Je viens ici depuis que j’ai le RMG. Je travaillais dans le nettoyage, mais il y a cinq ans, j’ai fait une dépression nerveuse et comme j’étais en période d’essai, j’ai été licenciée. J’ai touché le chômage, puis pendant un an et demi, j’ai vécu sans rien, quasiment comme une SDF. » Depuis qu’elle a eu accès à l’épicerie, Rachel vient toutes les semaines se fournir en aliments de base, mais aussi trouver un peu de chaleur humaine « Déjà, ça m’aide beaucoup, mais en plus j’adore venir ici, car les bénévoles sont super sympas, on discute toujours un peu », ajoute-t-elle, les yeux qui brillent.
Plus qu’une simple épicerie, c’est aussi en effet un moment de réconfort. Même si la pandémie est venue y mettre son grain de sel: « Avant, nous avions un café Stuff, c’était vraiment l’occasion pour les personnes isolées de trouver de la compagnie. On organisait aussi des ateliers parents-enfants, couture, informatique, cuisine… Nous avons dû tout mettre en suspens» , déplore la coordinatrice.
La pandémie a aussi eu un impact sur les ressources humaines, puisque les épiceries étaient tenues par des bénévoles dont beaucoup étaient âgés ou à risque, et qui se sont donc écartés le temps de la crise. Mais Caritas a malgré tout réussi à rester ouvert, en ayant notamment recours au personnel sous contrat ou sous convention, pour le plus grand soulagement d’Irène Jamsek. « C’est une fierté d’avoir pu rester tout le temps ouvert, on touche du bois pour que ça continue! »