Familles jetées sur les routes par la guerre, camps de fortune installés à l’orée des villes, rescapés de périlleuses traversées en mer : les chaînes d’information ont fini par banaliser les images de migrants, trop souvent réduites à une forme d’archétype du malheur contempo- rain. Ces actualités reflètent des situations bien réelles, comme celles que vivent actuellement les civils cherchant à quitter l’Afghanistan. Versant tragique des migrations, elles sont loin de résumer la réalité complexe, plurielle et mou- vante de ce phénomène majeur du xxie siècle. En 2020, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) évaluait à 272 millions le nombre de personnes ayant quitté leur pays pour fuir les violences, les catastrophes naturelles ou les effets du changement climatique, mais aussi étudier, travailler, s’inventer une vie ailleurs.
Wie Frontex eine deutsche NGO einschüchtert – trotz Widerstand des Europaparlaments
Die EU-Grenzschutzagentur verlangt von der kleinen Organisation »Frag den Staat« die Erstattung von 10.000 Euro Anwaltskosten. Frontex-Chef Leggeri stellt sich damit demonstrativ gegen das Europaparlament.
Die Formulierung der Europaparlamentarier war unmissverständlich. Frontex, die europäische Grenzschutzagentur, solle ihre Forderungen gegen die NGO »Frag den Staat« zurückziehen. Dass Frontex Tausende Euro an Anwaltskosten von den Aktivisten verlange, könne eine »abschreckende Wirkung« haben, schrieben die Parlamentarier im April. Man sei »zutiefst besorgt«. Im EU-Jargon ist das eine fortgeschrittene Eskalationsstufe.
Nun, kein halbes Jahr später, steht fest: Den Frontex-Chef Fabrice Leggeri kümmert das offensichtlich nicht. Er bleibt bei seiner Forderung. Falls das Geld bis Montag nicht da sei, sehe man sich gezwungen, das Geld einzutreiben, teilte Frontex »Frag den Staat« mit. Das geht aus einer E-Mail der Agentur an die Anwälte der NGO hervor, die dem SPIEGEL vorliegt. In dem Fall, so schreibt Frontex, werde es jeden Tag teurer.
Das Team von »Frag den Staat« besteht aus rund einem Dutzend größtenteils deutscher Mitarbeiterinnen und Mitarbeiter. Die kleine NGO bittet regelmäßig Regierungen und europäische Institutionen um Dokumente, die sie anschließend veröffentlicht. Sie beruft sich dabei auf europäische Informationsfreiheitsgesetze, will so die Arbeit der Regierenden transparent machen.
Frontex wollte zunächst mehr als 23.700 Euro haben
Auch interne Frontex-Dokumente fordert »Frag den Staat« immer wieder an. Als Frontex sich 2017 weigerte, eine Liste von Schiffen der Mittelmeeroperation »Triton« herauszugeben, klagte die NGO – und verlor. Für die Aktivistinnen und Aktivisten war es ein Routinevorgang; doch dann bekamen sie Post aus Warschau. Frontex, eine der mächtigsten EU-Behörden mit einem Jahresbudget von 543 Millionen Euro, stellte »Frag den Staat« Anwalts- und Reisekosten für den Prozess in Rechnung. Insgesamt 23.700 Euro.
Ein Gericht gab Frontex später recht, die Forderungen seien aber zu hoch, entschieden die Richter. Sie reduzierten sie auf 10.520,76 Euro – eine immer noch hohe Summe, die in ähnlichen Fällen nie fällig werde, sagt Arne Semsrott, Projektleiter von »Frag den Staat«. »Andere Institutionen wie die EU-Kommission bezahlen ihre Anwälte selbst und stellen nichts in Rechnung.«
Semsrott glaubt, dass Frontex Transparenzaktivisten wie ihn abschrecken möchte. Die Agentur ist für ihre Geheimniskrämerei bekannt. »Unsere Klage ist der erste Fall, in dem eine NGO von Frontex vor Gericht die Herausgabe von Dokumenten verlangt hat«, sagt Semsrott. »An uns soll ein Exempel statuiert werden.«
»Fabrice Leggeri nimmt das Europaparlament nicht ernst.«
Arne Semsrott, »Frag den Staat«
Ursprünglich hatte er gehofft, dass Leggeri das Votum des Europaparlaments respektieren würde. Auch, weil die Abgeordneten Leggeri und seine Agentur eigentlich kontrollieren sollen. »Dass Frontex die Anwaltskosten trotzdem einfordert, zeigt, wie wichtig ihm der Fall ist. Und dass er das Europaparlament nicht ernst nimmt«, sagt Semsrott.
»Es ist sehr besorgniserregend, dass Frontex der Empfehlung des EU-Parlaments nicht nachkommt«, sagt die niederländische Abgeordnete Tineke Strik dem SPIEGEL. Strik ist Berichterstatterin einer Prüfgruppe des Europaparlaments, die Frontex kontrollieren soll. In ihrem Bericht, der auch von der Fraktion der Konservativen mitgetragen wurde, erinnerte sie Leggeri explizit an den Parlamentsbeschluss. Frontex müsse endlich transparenter werden und erkennen, dass das auch die Glaubwürdigkeit der Agentur erhöhen würde, sagt Strik.
Frontex hat sich auf Anfrage des SPIEGEL bisher nicht geäußert.
Es ist nicht das erste Mal, dass Leggeri das Parlament missachtet. Wegen der Verstrickung in die illegalen Pushbacks von Flüchtlingen in der Ägäis steht die Agentur seit Monaten unter Druck. Griechische Grenzschützer setzen dort systematisch Schutzsuchende auf aufblasbaren Rettungsflößen auf dem Meer aus, wie SPIEGEL-Recherchen zeigten.
Leggeri wusste früh von den Aktionen der griechischen Grenzbeamten. Die Frontex-Grenzschützer helfen sogar bei den Menschenrechtsbrüchen, indem sie die Flüchtlinge stoppen und an die griechische Küstenwache übergeben. Einen besonders eklatanten Fall, so zeigen es die Recherchen, zeichneten Frontex-Beamte gar aus der Luft auf.
Doch als EU-Parlamentarier ihn zu den Pushbacks befragten, verschwieg Leggeri das brisante Material lange. Er versuchte, die Rechtsbrüche zu vertuschen. Zuletzt weigerte sich der Haushaltsausschuss des Europaparlaments deshalb, den Jahresabschluss der Agentur zu genehmigen und Leggeri zu entlasten. Linke, Grüne und Sozialdemokraten fordern seinen Rücktritt.
Aktivist Arne Semsrott wird die Anwaltskosten der EU-Agentur nun zahlen. Ihm bleibe schließlich keine andere Wahl, sagt er. Am Montag wollen er und seine Mitstreiter das Geld in Brüssel demonstrativ in einem Geldkoffer übergeben.
La Ville de Luxembourg se dit fière d’être une capitale avec plus de 124.000 habitants dont 70% sont des étrangers regroupant 165 nationalités. Cette grande diversité de nationalités, de cultures, d’origines sociales … donne à cette ville un dynamisme et un air cosmopolite d’ouverture sur le monde.
Mais nous assistons aussi à une gentrification rapide des habitants des quartiers plus populaires de la Ville. Ses habitants issus de milieux moins bien lotis ont de plus en plus de difficultés à trouver un logement abordable et sont remplacés par des résidents au pouvoir d’achat bien plus important.
Les tensions deviennent palpables. La pauvreté avec sa petite criminalité est stigmatisée et devient le bouc émissaire de tous les maux.
Or il va de soi qu’une ville riche comme Luxembourg soit confrontée à des problèmes sociaux et de criminalité visibles dans certains quartiers comme la Gare ou Bonnevoie. Les discours des politiques, rappelant sans cesse le climat d’insécurité ambiant dans la Ville, alimentent chez ses habitants et bien au-delà, des sentiments de peur et de méfiance de l’autre, incitent à se refermer sur soi.
On réduit la complexité des problèmes de vente et de consommation de drogues, des sans-abris, des mendiants … à leur visibilité dans les rues de la capitale, aux peurs de citoyens inquiets d’être agressés, au fait d’être importuné(e) par la vue de ces personnes « qui ne sont pas comme nous ». La frénésie du tout sécuritaire, où l’appel à une présence constante des forces de l’ordre à tout coin de rue alimente des tensions, des frustrations et le rejet de l’étranger pauvre, jeune, réfugié ou d’origine africaine … Il est clair que ces problèmes existent et doivent être pris au sérieux, mais dans toute leur complexité et pas seulement par une approche répressive et sécuritaire.
Nous estimons que ces discours renforcent les arguments des populistes défenseurs d’une Europe catholique et blanche. Le terreau se crée ainsi pour l’extrême droite grâce aux discours de certains politiques de nos partis et là est le véritable danger pour la démocratie.
Comme membres de la commission communale d’intégration de la Ville de Luxembourg, nous sommes alertées par les effets dévastateurs de ces affirmations sur la cohésion sociale dans notre ville, voire dans tout le pays.
L’importance de la cohésion sociale risque être comprise de manière négative et par là devenir encore plus inaccessible. Le fait qu’on mélange en plus de manière insidieuse dans ces discours les questions d’intégration des réfugiés et des migrants, nous paraît tout à fait inacceptable ! Se donner une vraie politique d’inclusion sociale des couches les plus vulnérables de la population au lieu de les stigmatiser, rehausserait la valeur de l’action politique et donnerait à tout citoyen la chance d’être acteur et non simple spectateur passif devant les discours.
Considérer les avis et suggestions des commissions communales fait partie du système politique communal. Mais alors pourquoi ne pas demander le point de vue de la commission consultative d’intégration de la Ville sur des thèmes d’actualité, surtout quand il y va du vivre ensemble de ses habitants ? Le vécu de ses membres pourrait donner un regard plus large, au-delà du seul horizon des frontières de notre pays, et nous donner la chance d’être créatif dans l’élaboration de solutions concrètes.
Pour nous, les défis du vivre ensemble existent et doivent avoir des réponses concrètes allant au-delà de la répression et de la sécurité ; il faut rendre visible les réalités et les contradictions sociales et mener une politique sociale ambitieuse qui analyse et explique la situation actuelle et adopte des solutions de prévention. Il faut cesser les discours alarmants et simplistes réduisant des problèmes de société à des solutions répressives.
Une ville est mieux armée contre ces phénomènes si ses habitants se connaissent, créent des liens et participent. Une vraie politique de l’accueil doit permettre à ses habitants – nouveaux et anciens – de se rencontrer et ainsi favoriser la curiosité de l’autre, l’ouverture d’esprit, la tolérance et l’égalité. Ainsi p.ex. la mise en place d’activités de mise en réseau des habitants par quartier augmenterait l’échange sur le vécu réel dans le quartier, inciterait à entreprendre des activités ensemble, tout en profitant de l’intelligence collective et des talents des habitants …
Activer et responsabiliser ses citoyens au lieu de leur faire peur fait partie d’une politique responsable et durable.
Utilisons les ressources : des citoyens comme ceux engagés au sein de la commission d’intégration de la Ville de Luxembourg qui veulent à participer activement à la mise en œuvre d’une politique plus inclusive.
Changements importants pour renforcer la participation politique des non-luxembourgeois
En date du 2 septembre 2021, la ministre de la Famille et de l’Intégration, Corinne Cahen, la ministre de l’Intérieur, Taina Bofferding, et la ministre de la Justice, Sam Tanson, ont présenté des changements en vue des prochaines élections communales en 2023. À l’avenir chaque citoyen pourra participer aux élections communales (et européennes), quelle que soit sa durée de résidence dans la commune. Afin de permettre aussi à davantage de citoyens non-luxembourgeois de participer aux élections communales, le dernier jour d’inscription sera reporté du 87e au 55e jour avant les élections. Trouvez le communiqué sur notre site.
Le site forum-CAI disponible en portugais
« Bem-vindo ao Luxemburgo!» Toutes les informations sur le Contrat d’accueil et d’intégration (CAI) ainsi que les formulaires d’inscription et les horaires des cours sont disponibles en portugais sur forum-cai.lu.
Campagne de visibilité des projets AMIF
Deux projets AMIF, soutenus par le ministère de la Famille, de l’Intégration et à la Grande Région et par le ministère des Affaires étrangères et européennes, font partie d’une campagne de visibilité. Découvrez les projets dans cette vidéo.
Corinne Cahen a présenté l’analyse sur les besoins des CCCI
Du 19 au 21 juillet, la ministre de la Famille et de l’Intégration, Corinne Cahen, s’était rendue à Bonnevoie, Wasserbillig, Ettelbruck et Soleuvre pour présenter les résultats d’une étude sur le fonctionnement et les besoins des CCCI. L’étude peut être consultée ici.
Save the date Le prochain GRESIL s’annonce
Le Département de l’intégration a le plaisir de vous annoncer la date du prochain GRESIL. La rencontre aura lieu le 17 novembre 2021 de 11:30 à 14:30 heures à Soleuvre. Sujet du GRESIL sera la création de lieux de rencontres et d’échanges au niveau communal.
Rappel Subsides pour actions d’intégration 2021
Toute association promouvant des projets en faveur de l’intégration peut soumettre une demande auprès du ministère de la Famille, de l’Intégration et à la Grande Région. Trouvez plus d’informations et tous les formulaires de demandes ici.
Nouvelle loi Compte-rendu des focus groups
Dans le cadre d’une révision de la loi d’intégration, la ministre de la Famille et de l’Intégration, Corinne Cahen, a invité les acteurs du terrain à échanger sur leurs points de vue en focus groups. Retrouvez le compte-rendu coordonné des quatre groupes ici.
Participation sociale Forum pour le 3e âge
Afin de renforcer l’intégration et la participation sociale des seniors dans les communes, la division des Personnes Âgées du ministère de la Famille, de l’Intégration et à la Grande Région invite au prochain « Forum pour le 3e âge », le 23 octobre 2021 à Walferdange. Les sujets de la réunion seront la digitalisation et l’intergénérationnalité. Plus d’informations sous peu sur luxsenior.lu.
ASTI informe sur le service écrivain public
L’ASTI invite à une réunion d’information pour acteurs communaux sur le service écrivain public bénévole. La visio-conférence aura lieu le mercredi 13 octobre de 12h15 à 13h45. L’ASTI et le CNDS organiseront fin novembre une formation d’écrivain public. Contactez agence.interculturelle@asti.lupour vous inscrire à cette formation.
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Après des mois et des mois de pandémie, l’heure est venue de se re – voir en
plénière du Ronnen Desch.
Rendez – vous mardi 26 octobre de 17.00 à 19.00 heures au Centre Culturel de Munsbach,
185, rue Principale L-5366 Munsbach dans le respect des mesures COVID.
Comme d’habitude toutes les participantes et tous les participants sont invité.e.s à échanger, à faire partie de leurs expériences.
Nous aurons de brèves actualisations de leurs politiques respectives de la part des Ministères de la Famille et de l’Intégration, du Ministère de l’Education Nationale, de la Direction de l’Immigration et de l’Office National pour l’Accueil.
Monsieur Romain Schneider, Ministre de la Sécurité Sociale, présentera les travaux du gouvernement en matière de Couverture Sanitaire Universelle, initiative « née » dans une plénière du Ronnen Desch.
Autre initiative issue d’une plénière : le site internet ACCES A MES DROITS sera présenté en version beta.
La commune de Schuttrange invite à un verre de l’amitié à la fin de la rencontre, vers 19.00 heures.
Nous vous invitons à partager la présente invitation avec vos collègues échevins et conseillers communaux ainsi qu’avec les membres de votre commission d’intégration.
Les intéressé.e.s sont prié.e.s de bien vouloir s’inscrire en faisant un mail à info@ronnedesch.lu pour le 22 octobre.
Au plaisir de vous rencontrer à Munsbach,
l’équipe de coordination du Ronnen Desch
se rendre au Centre Culturel de Munsbach
https://moovitapp.com/index/fr/transport_en_commun-Centre_Culturel_Munsbach-Luxembourg-site_37348837-3827
Des familles afghanes en transit à l’aéroport international Incheon à Seoul le 26 août 2021. Anthony WALLACE / AFP
Dans son ouvrage « Droit d’exil. Pour une politisation de la question migratoire » récemment paru aux Éditions MIX, le chercheur Alexis Nouss s’interroge sur la notion même d’exil et plaide pour la reconnaissance politique de la figure du migrant. Extraits choisis.
Le migrant d’aujourd’hui n’est pas celui d’hier, travailleur algérien ou immigré polonais. Il n’est pas que migrant, agent d’un processus global, il est aussi exilé, acteur de son histoire et de la nôtre. Comme pour tout processus de connaissance, nommer précisément les choses constitue une étape initiale indispensable. Or, une crise de la nomination est venue animer un débat terminologique sur la désignation des migrants qui arrivent en Europe – à ne plus nommer ainsi : cessons de les nommer migrants, ce sont des réfugiés.
Le raisonnement veut que les migrants quittent leur lieu de naissance ou de résidence pour trouver de meilleures conditions de vie et que, par conséquent, nommer tous ceux qui arrivent aujourd’hui en Europe des « migrants » gomme la guerre, l’oppression, la persécution qui ont fait fuir ceux qui ont droit à l’asile et au statut de réfugié. L’argument, de plus, se renforce lorsque la France, par exemple, veut accepter les réfugiés (politiques) et rejeter les migrants (économiques).
Unis par la détresse, les réfugiés seraient tous ceux qui ont fui les conditions d’une vie impossible et ce départ involontaire fait partie de leur identité. À ce titre, qu’ils fuient la guerre ou la misère importe peu, distinction proscrite au demeurant par la Convention de Genève de 1951. Loin d’une lâcheté, leur fuite affirme la noblesse humaine qu’ils n’acceptent pas de voir niée en eux. S’ils fuient afin de vivre, leur refuser l’asile, même sous la forme d’une simple dénomination, équivaut à adopter une complicité passive avec ceux qui les ont poussé à la fuite. Être réfugié signifie d’abord être lorsqu’un sujet fuit la menace du non-être. L’exil ou la mort. […]
Quand le migrant cesse de migrer
Pour commencer, il est bon de soumettre les deux termes à la logique grammaticale. Migrant : participe présent du verbe « migrer ». Le migrant migre, le participe présent désignant en français une action en train de se faire et l’agent de cette action. Quand le migrant cesse de migrer, quand il est arrivé, il n’est donc plus (un) migrant. Qu’est-il donc ? Réfugié : vient du latin fugere, qui signifie « fuir », le préfixe re – indiquant non la répétition mais l’intensité. Un réfugié fuit.
Quand le réfugié cesse de fuir, quand il est arrivé, il n’est donc plus (un) réfugié. Qu’est-il donc ?
Jeunes femmes éthiopiennes ayant fui la vallée du Tigray, en guerre, et actuellement réfugiées au camp de Umm Rakuba, à l’est du Soudan, 11 août 2021.Ashraf Shazly/AFP
La rigueur terminologique prend le relais. Elle nous rappelle que la famille « migrante » appartient au vocabulaire animalier : les oiseaux ou les poissons migrent par instinct sans pouvoir s’y soustraire alors que les humains s’exilent en ce que, même soumis à la nécessité du départ, ils peuvent en bâtir un projet et transformer leur condition en conscience. En outre, les termes connexes (émigrants, immigrants, émigrés, immigrés) fleurent les décennies de l’après-guerre en Europe où l’idéologie du progrès et de la reconstruction demandait de la main-d’œuvre, « années-bonheur » dissipées aux vents de crises économiques successives.
Quant à l’emploi de « refugié », il relaie une erreur de catégorisation juridique et une approximation lexicale puisque la langue du droit n’utilise le terme et n’octroie le statut que lorsque l’asile a été administrativement accordé. De surcroît, l’appellation reconnaît à l’arrivant un destin mais qui ne dépend pas de lui car celui qui nomme (ou non) le réfugié en décidant de son statut se trouve sur un seuil, investi du pouvoir d’ouvrir ou non la porte. Un privilège qui sert à pleinement fonder l’hospitalité (« je t’accueille car tu viens ») autant que son refus (« je ne t’accueille pas car tu viens me tuer »).
Le « demandeur »
Autre prétendant lexical, le « demandeur d’asile ». Encore faut-il que la demande soit faite, c’est-à-dire que les conditions qui permettent de la déposer soient réunies, un encouragement qu’en France sont loin de dispenser les autorités. Si la position de demandeur crée de facto et d’une façon générale une asymétrie qui place les uns en position de pouvoir et les autres de soumission, la notion d’asile, elle, appelle à être examinée dans sa dimension temporelle.
On demande le refuge ou l’asile comme on donne le refuge ou l’asile mais cela ne suffit pas pour poser l’équivalence entre les deux notions. Puisque refuge sous-entend une fuite, il souligne une action en mettant l’accent sur la destination, en l’occurrence le dispositif qui donnera refuge et il suppose un terme éventuel à cette action, la valeur d’un refuge prenant sens devant l’imminence d’un danger et le perd lorsque le péril est écarté.
Ce qui éclaire des mesures telles que, en France, la « protection subsidiaire » et, au niveau européen, la « protection immédiate et temporaire », statuts de substitution lorsque les conditions pour l’octroi du statut de réfugié ne sont pas réunies. Celui-ci, d’ailleurs, n’est pas inamovible car il peut être révoqué ou on peut y renoncer.
L’asile, espace préservé
La Esmeralda donne à boire à Quasimodo. Une larme pour une goutte d’eau, huile sur toile de Luc-Olivier Merson, Maison de Victor Hugo, 1903.Luc-Olivier Merson/Wikimedia
Asile, par contre, dont le sens étymologique renvoie à un espace préservé du pillage, implique un lieu et induit une idée de permanence. L’asile offre de reconstruire une vie, le refuge la protège provisoirement. Dans Notre-Dame de Paris, Victor Hugo évoque les villes françaises qui, depuis le Moyen-Âge jusqu’au XVIe siècle, intégraient des « lieux d’asile » considérés comme « des espèces d’îles qui s’élevaient au-dessus du niveau de la justice humaine » et qu’il détaille :
« Les palais du roi, les hôtels des princes, les églises surtout avaient droit d’asile ».
Au grand bonheur (hélas provisoire) d’Esmeralda, c’est le lieu – cathédrale qui possédait et exerçait le droit d’asile auquel avait accès l’individu le choisissant. Dans certains états américains, cette tradition de l’asile dans les lieux de culte est perpétuée. On se souvient aussi de l’Église Saint-Bernard à Paris en 1996 dont l’évacuation anticipa les violences policières ultérieures à l’endroit des migrants.
Un mélange de droit du sol et du droit de la personne, en somme, moins arbitraire en cela que le droit d’asile tel qu’administré aujourd’hui sous les auspices de l’OFPRA, du CNDA et du ministère de l’Intérieur. Ce qui est d’autant plus inacceptable que ce droit appartient au registre démocratique fondamental. Alors qu’il souffrait de ne pas le recevoir du gouvernement allemand de 1930, Trotsky y voyait une contradiction car il considérait le droit d’asile comme un principe essentiel de la démocratie :
« L’utilisation du droit d’asile, en principe, ne se distingue nullement de l’utilisation du droit de vote, des droits de liberté de la presse, de réunions, etc. »
Ni migrant, ni réfugié, alors qui est-il ?
Ni migrant, ni réfugié, qu’est-il alors, celui qui vient et demande asile ? Toute la question. Migrants ou réfugiés : les termes, supposés qualifier les individus visés, servent surtout à les agglomérer en une masse anonyme.
Les nommer « exilés » les sort d’une telle opacité et affirme que le migrant est un sujet, un sujet en exil, avec une histoire, une mémoire, un chemin, un récit, une expérience à partager dont les récits religieux ou littéraires des pays d’accueil ont façonné les cadres et les mémoires familiales recueilli les traces.
Le terme « migrant » n’est pas abandonné dans ces pages afin d’affirmer un lien dialectique avec « exilé » et puisqu’il est celui employé par l’opinion publique et par la prose journalistique pour désigner les arrivants irréguliers en Europe, celles et ceux vivant le drame de l’exil de masse contemporain. En outre, il s’attache encore à la notion d’exil une connotation élitiste comme si elle ne concernait qu’une minorité somme toute privilégiée (des personnalités artistiques ou politiques), ce qui la rend préjudiciable à notre usage.
« L’exilé » s’inscrit dans une tradition culturelle connue et positivement valorisée en Europe au point qu’une aura de respect s’attache à sa figure, une noblesse – indépendamment du fait que de nombreux aristocrates ont fui les révolutions car, symétriquement, de nombreux révolutionnaires roturiers ont dû choisir l’exil. À ce titre, le migrant doit d’abord être reconnu comme un exilé. En outre l’usage de ce dernier terme pour désigner les migrants irréguliers aide à spécifier cette migration autrement que par son irrégularité.
La transmissibilité de l’exil
La pérennité de l’asile résonne avec la transmissibilité de l’expérience exilique. Là où le migrant porte une identité destinée à disparaître après l’intégration ou l’assimilation, l’exilé conserve la sienne quelle que soit l’issue du parcours car il garde mémoire de l’avant qu’il fait dialoguer avec le présent pour le transmettre aux générations à venir et féconder le futur.
La migration réclame des chiffres, l’exil exige des mots ; la migration consiste en un trajet, l’exil dans le récit du trajet. L’entendre redonne un vécu au migrant, riche et pluriel, apte à guider le vivre-ensemble malaisé des sociétés contemporaines. Car même lorsque l’itinéraire migratoire est reconnu, le discours citoyen insiste sur le point d’arrivée, le discours communautariste sur le point de départ.
Or, l’expérience exilique conjoint les deux, dans une dynamique de multi – appartenance qui vient redonner souffle aux mécanismes de cohésion interne, ce dont ont vitalement besoin les nations européennes autant que la communauté les rassemblant, tant elles sont toutes en panne d’idéaux unificateurs, mis à part les populismes de tout bord.
Le russe Léon Trotsky (à gauche), accompagné de son épouse Natalia Sedova, est reçu par la peintre mexicaine Frida Kahlo à son arrivée à Mexico, le 24 janvier 1937.Acme/AFP
Dire que le migrant est d’abord un exilé, c’est passer de la stricte question migratoire à la condition exilique et initier un changement qui compte stratégiquement car il permet, élargissant considérablement l’angle de vue, de fonder conceptuellement la possibilité d’un droit d’exil inhérent à cette condition. Une condition exilique, de même qu’on a pu traiter d’une condition humaine, d’une condition féminine, d’une condition noire, d’une condition juive, même si ces exemples peuvent sembler suspects en nos temps de déconstruction identitaire généralisée.
On habite le monde, le monde nous habite
Si les conditions de ces « conditions » sont évidemment historiques, variées et variables, brisant ainsi toute prétention d’essentialisation, les identifier et les désigner permet de les considérer comme des aspects de l’« humaine condition » qui, de Montaigne à Hannah Arendt, a inspiré les luttes d’émancipation en sollicitant la conscience née d’une appartenance commune.
L’expérience exilique module et traduit à la fois la condition humaine comme l’interprètent à leur façon la condition noire ou la condition féminine, nuances du prisme aux multiples facettes qu’est le vivre-humain. L’exil ou la mort car seul l’exilé meurt – le migrant et le réfugié n’ont que des existences de (sans-)papier. Ne pas accueillir l’arrivant par devoir moral ou politique ou par intérêt mais parce que nous partageons une même condition de vivant, un même habitat sur terre. Un lieu ne garantit pas plus une appartenance qu’une identité – on habite le monde, le monde nous habite : « Casa mia, casa tua » disent les Italiens, « Casa nostra, casa vostra », disent les Espagnols.
Célébrer l’exil en tant que forme de vie – selon l’expression de Ludwig Wittgenstein qui, de Vienne à Londres, pratiquait la philosophie comme un exil loin de toute certitude – amène à regarder différemment le monde qui nous entoure. Si l’exil, au-delà de sa définition géographique ou politique, désigne d’une manière générale, l’absence d’un chez-soi permanent et protecteur, toute personne privée d’un tel droit fondamental peut être considérée en exil : en dehors d’un pays, en dehors d’un tissu communautaire, en dehors d’une norme sociale. Habiter l’incertain résume l’expérience de la migration en y intégrant celles de la précarité urbaine, de l’internement psychiatrique, de la prison, de la prostitution, de la maladie ou du handicap.
Ce sont là des exils de proximité qui devraient éveiller la sensibilité aux migrations venues de loin. L’entendre et le comprendre veille à l’exercice d’une démocratie qui ne connaît de frontières, internes ou externes, que pour savoir, lorsqu’il le faut, les ouvrir et accueillir l’autre.
L’auteur est titulaire de la chaire Exil et Migrations à la FMSH.
ANNETTE WELSCH – LUXEMBURGER WORT 25. August 2021 Editorial
Es sind Bilder einer furchtbaren Verzweiflung, die den Westen erreichen, wenn Menschen sich an Flugzeuge klammern, um Afghanistan noch rechtzeitig verlassen zu können. Menschen, die sich trotz 20 Jahren Krieg und vieler Fehler der westlichen Alliierten die Hoffnung machten, in Freiheit, Würde und Gleichheit, mit Bildung und Chancen ein akzeptables Leben in ihrem Land führen zu können. Sie flüchten vor der Taliban-Diktatur und ihrer strengen Scharia, vor einem drohenden Bürgerkrieg, aber auch vor einer schweren Dürre und Hungersnot.
Dix associations ont demandé au gouvernement de changer sa position concernant le traitement des réfugiés afghans. Un appel pour accueillir ceux qui veulent fuir a été lancé.
Le Quotidien 24-08-2021
L’accueil des réfugiés en provenance d’Afghanistan et leur protection internationale reviennent au cœur de l’actualité.
Photo : afp
Un appel au gouvernement a été lancé hier par dix associations concernant la situation des Afghans au Grand-Duché mais aussi dans leur pays. Le communiqué commun a été signé par l’ACAT, l’Afghan-Lux Community Outreach, Amnesty International Luxembourg, le CLAE, l’ASTI, Open Home, Passerell, Time for Equality, Reech Eng Hand et l’association Ryse. Pour les membres de ces structures, il est urgent d’agir. En effet, la dégradation sécuritaire dans le pays après la prise de pouvoir par les talibans nécessite des décisions fortes et immédiates. «Il est maintenant clair, même pour celles et ceux qui ont ignoré les alertes de la société civile, qu’il y a un vrai danger généralisé pour la sécurité de la population, particulièrement des femmes, des membres des minorités religieuses et ethniques, à la communauté LGBTQI+, ainsi que des hommes et femmes ayant travaillé ou collaboré avec les armées ou les organisations étrangères», insistent les associations. Ces dernières sont en colère car depuis fin 2019, les Afghans et les Afghanes ne reçoivent plus de protection internationale comme si les talibans ne représentaient plus une menace. Aujourd’hui les choses ont bien changé et le gouvernement doit revoir sa position concernant l’accueil et surtout l’accès à la protection internationale des Afghans ou Afghanes qui viendraient trouver refuge au Grand-Duché.
«Pour les associations et organisations signataires, l’étendue et l’urgence de la crise obligent le Luxembourg et l’Union européenne à agir à plusieurs niveaux, sachant que depuis plusieurs années, l’Afghanistan figure parmi les principaux pays d’origine des demandeurs de protection internationale au Luxembourg et en Europe», poursuit le texte.
Couloirs humanitaires
De plus, les associations pensent également aux Afghans et Afghanes désirant quitter le pays désormais aux mains des fondamentalistes. «Après l’annonce du rapatriement des ressortissants et résidents luxembourgeois se trouvant sur le territoire afghan, il y a lieu d’assumer nos responsabilités en contribuant activement à la mise en sécurité des personnes risquant la vindicte du pouvoir en place», estiment les associations signataires. Selon ces dernières, la communication du gouvernement laisse entendre que seuls les hommes et femmes ayant travaillé ou collaboré avec les armées ou les organisations étrangères pourraient profiter de ce rapatriement. Pour les signataires, la réponse à l’urgence humanitaire doit être beaucoup «plus large».
Les dix associations demandent donc le maintien de l’arrêt complet des renvois pour des demandeurs de protection internationale de nationalité afghane déboutés. Elles souhaitent le réexamen de la situation des personnes déboutées du droit d’asile qui se trouvent au Luxembourg à la lumière de la nouvelle situation politique et militaire et l’octroi d’une protection pour ces personnes. Elles veulent aussi l’accélération du traitement des dossiers de protection internationale et de regroupement familial en cours en prenant en compte la violence extrême qui règne en Afghanistan. Elles désirent l’ouverture de couloirs humanitaires sûrs pour celles et ceux qui voudront fuir et demander la protection internationale en Europe et l’octroi de visas humanitaires pour les membres de famille des Afghans et Afghanes ayant obtenu le statut de réfugié ou la protection subsidiaire au Luxembourg.
L’inquiétude de la CCDH
La Commission consultative des droits de l’homme du Grand-Duché de Luxembourg (CCDH) s’est dit très préoccupée par la situation en Afghanistan. Ses membres sont indirectement en contact avec leurs collègues de la Commission indépendante des droits humains afghane (Afghanistan Independent Human Rights Commission – AIHRC). Celle-ci est composée de 90 personnes, pour une majorité de femmes. La CCDH est très inquiète car toutes ces personnes, de même que leurs familles, courent actuellement de gros risques pour leur vie. La CCDH demande que ces personnes puissent être exfiltrées afin de quitter l’Afghanistan dans les meilleurs délais. «Toute aide logistique et administrative de notre gouvernement est la bienvenue et ce faisant rejoindrait les efforts que d’autres pays de l’Union européenne sont en train de réaliser», estiment les membres de la commission. «Nous faisons nôtres les revendications d’ONG luxembourgeoises qui demandent que les personnes afghanes séjournant au Luxembourg et déboutées du droit d’asile puissent obtenir dans les meilleurs délais le statut de bénéficiaires de protection internationale», ajoutent-ils. Pour eux, aucun renvoi de déboutés de protection nationale n’est envisageable, ni dans le court, ni dans le long terme. La CCDH estime que l’Union européenne devrait ouvrir des couloirs humanitaires pour permettre aux citoyens afghans de demander la protection internationale et demande au gouvernement luxembourgeois de faire preuve de diligence pour aider toutes ces personnes.